dimanche 24 octobre 2010

Incendies : le destin d’une famille perdu dans le brasier

L’apparition du générique à la fin du quatrième long métrage de Denis Villeneuve, Incendies, équivaut à la sensation de s’éveiller au terme d’un horrible cauchemar. Un scénario prenant, des acteurs crédibles et une mise en scène qui vient vous bousculer au plus profond des tripes vous plongent dans l’horreur de la guerre civile pour deux heures et demie remplies d’intensité.

            La pièce Incendies de Wajdi Mouawad n’aurait pas pu trouver meilleur réalisateur que Denis Villeneuve pour faire le saut au grand écran. On pouvait en effet s’attendre à quelque chose d’exceptionnel de la part du scénariste et réalisateur québécois dont les deux premiers longs métrages ont été en nomination aux Oscars 1999 et 2000.  Le duo Mouawad-Villeneuve met en scène une histoire explosive qui a déjà prouvé tout son potentiel au box-office québécois.

            À la mort de leur mère Nawal (Lubna Azabal), les jumeaux Jeanne (Mélissa Désormeaux-Poulin) et Simon (Maxime Gaudette) se voient remettre par le notaire Lebel (Rémy Girard) deux lettres écrites de la main de la défunte. L’une à donner à un père qu’ils croyaient mort, l’autre à l’adresse d’un frère insoupçonné. Ces dernières volontés les mènent au Liban, pays d’origine de Nawal, dans une quête qui les conduit sur les traces d’une mère dont ils ignoraient tout du passé choquant et bouleversant. Ainsi, le scénario met plutôt l’emphase sur la vie de Nawal. De sa jeunesse jusqu’à sa mort, le cinéphile est transporté dans un univers où la tradition, la religion et la guerre jettent leurs embûches sur la route d’une femme au courage incommensurable. L’histoire de Nawal se dévoile au même rythme que la progression de l’enquête de Jeanne et Simon. Le spectateur est donc balloté entre le désœuvrement des jumeaux et la terreur qui semble avoir été cousue au destin de leur mère.

            L’intensité qui se dégage du film n’aurait pas tout son effet sans les puissantes performances des acteurs. En particulier dans le cas de Lubna Azabal qui, dans le rôle de Nawal, arrive à faire ressentir autant la peur de son personnage lorsqu’elle est seule, la nuit, dans un village dévasté par la guerre, que la tristesse et l’attendrissement qui la gagnent lorsqu’elle doit abandonner son premier enfant à la naissance. Le courage et la détermination de Nawal n’auraient pu marquer l’auditoire si profondément sans une interprétation aussi juste de la part d’Azabal.

            La mise en scène du film occupe une place importante dans la création de cette atmosphère tendue et tragique qui se perpétue du début à la fin. Une scène particulièrement intense où une petite fille se fait tuer par une bande d’hommes armés se déroule au ralenti et dans un silence presque complet où seul le bruit assourdi des mitraillettes réussit à apporter des frissons à l’auditoire atterré. La plus grande partie du film ayant été tournée en Jordanie, les lieux parlent d’eux-mêmes. D’entrée de jeu, les paysages inconnus ont un effet déconcertant chez l’auditoire. Les situations tragiques vécues par les personnages trouvent alors un plus grand impact dans l’imaginaire du public. Incendies est un film dérangeant et percutant qui sort le cinéphile de sa zone de confort.

Le film a été sélectionné pour représenter le Canada dans la course aux Oscars de 2011. Il a d’ailleurs remporté le prix du Meilleur film canadien au Festival d'Halifax au mois d’octobre 2010.












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